Social
Licenciement sans cause réelle et sérieuse
Barème Macron : les périodes d'absence pour maladie doivent être incluses dans le calcul de l'ancienneté du salarié
Le salarié dont le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse a droit à une indemnité dont le montant minimal et maximal varie en fonction de son ancienneté dans l'entreprise (application du « barème Macron »). La Cour de cassation confirme qu'aucune restriction n'est prévue pour la prise en compte des périodes de suspension du contrat de travail dans le calcul de l'ancienneté. Les périodes d'absence du salarié pour maladie doivent donc être incluses dans ce calcul.
Rappel sur les planchers d’indemnisation fixés par le barème Macron
Lorsque le juge estime qu'un licenciement est sans cause réelle et sérieuse, le salarié, s’il n’est pas réintégré, perçoit une indemnité spécifique.
Pour fixer le montant de cette indemnité, le juge doit appliquer un barème légal d'indemnisation (dit « barème Macron ») qui impose des planchers et plafonds et d’indemnisation, variant en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise, en années complètes (c. trav. art. L. 1235-3 ; cass. soc. 3 avril 2024, n° 23-13452 D).
À noter : l’ancienneté du salarié s’apprécie à la date d’envoi de la lettre de licenciement (cass. soc. 26 septembre 2006, n° 05-43841, BC V n° 288).
À titre dérogatoire, des planchers d’indemnisation plus faibles sont prévus pour les entreprises employant habituellement moins de 11 salariés (c. trav. art. L. 1235-3, al. 3).
Pour un salarié dont l’ancienneté dans l’entreprise est inférieure à un an, quel que soit l'effectif de cette dernière, aucun montant minimal d’indemnisation n’est fixé par le barème. Mais il n’est pas pour autant privé d’indemnité : il a droit à une indemnité dont il appartient au juge de déterminer le montant dans la limite maximale d’un mois de salaire brut prévue par le barème (cass. soc. 12 juin 2024, n° 23-11825 FB ; cass. soc. 29 janvier 2025, n° 23-17006 D), sans avoir à prouver l'existence d'un préjudice (cass. soc. 29 janvier 2025, n° 23-16577 D ; cass. soc. 29 janvier 2025, n° 23-17006 D).
Une salariée privée d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de son ancienneté
Une salariée, embauchée en contrat à durée indéterminée le 9 mai 2016 dans une entreprise de moins de 11 salariés, a été licenciée pour motif économique le 17 avril 2019.
Elle a contesté ce licenciement en justice.
La cour d’appel a jugé que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse mais l’a déboutée de sa demande d’indemnité à ce titre.
Elle a en effet considéré que la salariée ne totalisait pas un an d’ancienneté dans l’entreprise en raison de ses arrêts de travail pour maladie non professionnelle intervenus à compter du mois de novembre 2016 (ce qui donnait donc pour la cour d’appel une ancienneté de 6 mois).
Or, pour la cour d’appel, la salariée qui bénéficie d'une ancienneté de moins d'un an dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés ne peut pas prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Contestant l'exclusion de ses périodes d’arrêt maladie dans le calcul de son ancienneté, la salariée s’est pourvue en cassation.
Les périodes d'absence pour maladie doivent être prises en compte dans le calcul de l’ancienneté du salarié pour l’application du barème Macron
La Cour de cassation se prononce en faveur de la salariée.
Elle précise que les dispositions légales relatives au barème Macron (voir ci-dessus) « ne comportent aucune restriction en cas de suspension d’exécution du contrat de travail ».
Les périodes d’absence pour maladie doivent donc être incluses dans le calcul de l’ancienneté du salarié pour l’application de ce barème.
La Cour de cassation confirme ainsi sa jurisprudence rendue dans le cadre de l’indemnisation des licenciements sans cause réelle et sérieuse intervenus avant l’application du barème (cass. soc. 7 décembre 2011, n° 10-14156 , BC V n° 288 ; cass. soc. 23 septembre 2015, n° 14-24946 D).
À noter : pour rappel, le barème Macron s'applique aux licenciements prononcés après le 23 septembre 2017 (ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017, JO du 23, art. 40, I).
Dans cette affaire, c’est donc à tort que la cour d’appel a retenu que l’ancienneté de la salariée était inférieure à un an, alors qu’elle comptait, périodes de suspension du contrat de travail pour maladie incluses, plus d'une année d'ancienneté au sein de l'entreprise.
La Cour de cassation censure la décision de la cour d’appel et statue au fond, en appliquant le barème Macron : en considération de son ancienneté (2 ans et 10 mois), la salariée peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimum de 0,5 mois de salaire brut et un montant maximum de 3,5 mois de salaire brut. Eu égard à sa rémunération brute mensuelle (1 711,41 €), elle décide de lui allouer à ce titre la somme de 5 989 € (soit le maximum possible en application du barème).
À noter : bien que la censure de la décision de la cour d’appel porte ici sur le calcul de l’ancienneté de la salariée licenciée sans cause réelle et sérieuse, on notera qu’elle encourait la censure même si la salariée avait bien eu une ancienneté inférieure à un an, dès lors que cette dernière avait également droit, dans ce cas, à une indemnité, mais sans application d’un montant minimum d’indemnisation (voir plus haut).
Cass. soc. 1er octobre 2025, n° 24-15529 D
